Documents GUEDJ-BOURDIAU Marie-Jeanne 3 résultats

Au carrefour du psychologique, du social et du comportemental, la conduite hikikomori reste un défi pour la psychiatrie. Ce retrait sévère au domicile touche principalement les adolescents et les jeunes hommes et impacte toute la sphère familiale. Il se rencontre dans des organisations psychopathologiques diverses et interroge la dimension du normal et du pathologique. Au-delà de la question du diagnostic, les pistes thérapeutiques visent avant tout à faire cesser la claustration. Repères cliniques et cadre de prises en charge.[-]

L'enfermement à domicile du jeune, qu'il soit associé ou non à un diagnostic psychiatrique, est un problème mondial qui reste longtemps invisible. Le phénomène est de mieux en mieux connu, entre autres à la faveur de la généralisation de la notion d'hikikomori. Cela désigne une conduite qui tend à se répéter, et qui finit par englober tous les membres de la famille autour des enjeux d'attachement et de séparation/individuation. C'est un auto-sabotage plutôt involontaire que choisi. Les symptômes psychiatriques qui y sont ou non associés ne peuvent rendre compte du retentissement majeur sur la qualité de vie du jeune et sur le fardeau ressenti par l'entourage. Le travail avec les familles discuté dans cet article témoigne d'une expérience clinique développée ces dernières années autour des consultations de familles dans une situation de hikikomori. Soulager le fardeau familial par des entretiens de guidance est au cœur de ce travail. Cela permet de se dégager de la culpabilité et de la honte, d'en finir avec les parents de l'enfance, et de sortir de l'isolement en faisant intervenir des tiers. Ces propositions sont discutées à la lumière des recherches provenant d'autres équipes, en majorité japonaises. Un réseau de professionnels s'est structuré avec l'association francophone AFHIKI pour réfléchir à l'adaptation de ces types de réponses à notre contexte culturel. Si des études sur les familles avec une situation de hikikomori existent depuis longtemps au Japon, elles commencent à voir le jour dans d'autres pays, notamment l'Espagne et l'Italie et mériteraient d'être mieux développées en France.[-]

Les 170 ans de la Société Médico-Psychologique sont l'occasion de réactualiser le travail d'un grand clinicien toulousain, le Professeur Louis Gayral, et la clairvoyance des Annales Médico-Psychologiques pour avoir publié en 1953 son volumineux article de 27 pages sur « la claustration », nous disons aujourd'hui « retrait social sévère/hikikomori ». Cette conduite consiste à se retirer de la société et des relations aux autres, du moins des relations in real life. C'est une difficulté rencontrée par nos sociétés contemporaines qui, telle une addiction, tend à se reproduire. Elle comporte un jeune, un entourage, un état particulier de la société. Le travail de Gayral montre que cette conduite était décrite en 1953, et nous proposons de comparer sa description et la description actuelle. Ce clinicien repère de façon générale les aspects transnosographiques et dimensionnels, ce qu'il appelle le « choix du symptôme », abordé sur le plan de l'individu, de son inconscient et de son vécu propre. Ce symptôme lui paraît un symptôme majeur en pathologie mentale, il ne relèverait pas seulement des symptômes d'une maladie mais d'un conflit malade/monde original, en reconnaissant que l'aspect sociétal ne peut être identique aujourd'hui. Il soutient des idées qui sont le fil rouge aujourd'hui de la réflexion transnosographique et sociétale concernant le retrait social/hikikomori. Ainsi la maladie mentale est pour lui la rencontre d'une personnalité, à un moment donné particulier, avec une série de circonstances ou des causes multiples et intriquées. Clinicien « de la théorisation au pragmatisme », il développe donc les aspects dimensionnels. Revenir comme le suggère Gayral à une attitude clinique rejoint les avancées actuelles.[-]